La pharmacie vétérinaire ailleurs qu'en Tunisie
Le marché des médicaments vétérinaires dans les trois pays d’Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie) progresse au rythme de 5% par an, boosté par le très important développement de l’aviculture industrielle dans ces trois pays. L’accroissement du nombre de vétérinaire installés en libre pratique ainsi que le développement de l’élevage laitier interviennent également pour expliquer la progression d’un marché du médicament vétérinaire, partagé entre les médicaments pour les bovins et autres ruminants et les médicaments, vaccins et vitamines pour l’aviculture industrielle. Ce marché pèse plus de 200 millions de Dinars tunisiens, dont environ 13% soit 26 millions de Dinars pour le seul marché tunisien.
En Tunisie, le monopole de l’importation
qui devait être supprimé en 2011, est détenu par l’État à travers des
institutions telles que la Pharmacie Centrale pour ce qui est des médicaments,
l’Institut Pasteur pour les vaccins et produits biologiques. La distribution
des produits se fait directement par la PCT aux vétérinaires propharmaciens et
par les pharmaciens grossistes répartiteurs.
En Algérie, l’importation et la distribution des
médicaments vétérinaires sont du domaine du secteur privé vétérinaire ; ce ne sont pas les
pharmaciens qui commercialisent les produits vétérinaires mais les vétérinaires. La Direction des Services Vétérinaires
est chargée de veiller à l'application des textes législatifs et réglementaires
relatifs à l'importation, la fabrication, la distribution et l'utilisation du
médicament vétérinaire. Cette Direction, est chargée de tenir à jour la
nomenclature des produits pharmaceutiques et biologiques à usage vétérinaire,
de délivrer les autorisations de mise sur le marché (AMM) de ces produits, de
coordonner et de contrôler les circuits de distribution et de proposer toute
réglementation relative à ces produits.
La médecine, la chirurgie et la
pharmacie vétérinaires sont réglementées par la loi 21-80 du 9 juin 1980 qui
stipule notamment que, les établissements de fabrication et de distribution en
gros des médicaments vétérinaires, doivent être la propriété d’un pharmacien,
d’un vétérinaire ou d’une société dont la direction générale est assurée par un
pharmacien ou par un vétérinaire. Elle stipule également que la fabrication, la
composition, la préparation et le conditionnement en vue de la vente, de
produits pharmaceutiques vétérinaires, ne peuvent s’effectuer que sous la
surveillance directe des pharmaciens ou des vétérinaires. Cette loi stipule en
outre que la préparation extemporanée, la détention en vue de leur cession aux
utilisateurs et la délivrance au détail, des médicaments vétérinaires sont
réservés aux pharmaciens d’officine mais aussi aux vétérinaires libres
praticiens, sans tenir officine ouverte, dans les lieux d’exercice de leur
profession, à domicile ou dans celui de leurs clients, à condition que le
médicament soit administré par le vétérinaire lui-même ou sous sa
responsabilité. Cette loi autorise le vétérinaire à exercer la pharmacie
vétérinaire. Il détient le médicament pour l'administrer à l'animal dès le diagnostic
établi, au niveau des exploitations, et pour éviter aux éleveurs des trajets
pour exécuter une ordonnance auprès des officines. La Direction de
l’élevage comprend un service de la pharmacie vétérinaire, chargé de l’élaboration de la stratégie
nationale de maîtrise du médicament vétérinaire, de son enregistrement et de son
contrôle, la conduite d’inspections pharmaceutiques et la pharmacovigilance ainsi
que le contrôle des circuits de commercialisation. Cette direction comprend
aussi le Laboratoire
National de Contrôle des Médicaments Vétérinaires.
En France, le Conseil d'État a laissé la
liberté aux éleveurs quant au choix du dispensateur du médicament vétérinaire.
Une loi autorise les vétérinaires à prescrire et à délivrer des médicaments
vétérinaires sans consultation mais reposant uniquement sur le suivi réalisé
par le vétérinaire dans l’élevage concerné afin de garantir une denrée saine au
consommateur. De ce fait, les propriétaires d’animaux préfèrent le plus souvent
faire appel à un médecin vétérinaire qui a la faculté de délivrer immédiatement
et sur place des médicaments et c’est là une des raisons de l’opposition
farouche des pharmaciens à la pharmacie et à la pro-pharmacie vétérinaires.
La pharmacie nationale vétérinaire
(PHARNAVET) a été créée en juin 1989 et en 1990 l’État s’est désengagé de
toutes les activités de production ou de commercialisation de médicament et
autres produits vétérinaires et ne s’est plus occupé que du contrôle de la
qualité de ces produits. L'importation et la distribution des médicaments
vétérinaires au Benin se font aussi bien par des structures étatiques que
privées. Les structures étatiques sont essentiellement représentées par la
PHARNAVET, les structures de recherches et celles des projets d’élevage de
l’Etat, alors que les structures privées sont les sociétés, les pharmacies
vétérinaires et les cliniques vétérinaires agréées qui s’approvisionnent
directement auprès de laboratoires pharmaceutiques, européens pour l’essentiel.
Au Sénégal, la réglementation en matière
de médicaments vétérinaires repose essentiellement sur la Loi 57-418 du 25
avril 1954 et sur la Loi 75-409 du 29 mai 1975, en son chapitre III.
La Direction de l’Élevage et la
Direction de la Pharmacie se disputent la délivrance de visas d’importation des
médicaments vétérinaires aux pharmaciens et aux vétérinaires ainsi qu’à des sociétés
privées. Le secteur est assez anarchique en matière de commercialisation et de
production des médicaments vétérinaires mais confirme la place prépondérante
des médecins vétérinaires.
La pharmacie
vétérinaire existe au Soudan depuis 1931. Des lois, décrets et réglementation,
forment la base juridique de l’exercice de la pharmacie vétérinaire dont la loi
du 11 novembre 1998, portant création et organisation de la compagnie générale
des fournitures vétérinaires (Veterinary Supplies General Corporation). Cette
compagnie constitue une des plus importantes structures des services
vétérinaires ; elle est chargée de l’importation, du stockage et de la
distribution des équipements et des médicaments et vaccins nécessaires à la
couverture sanitaire d’un cheptel estimé à 120 millions de têtes. Par ailleurs,
plus de 26 sociétés vétérinaires, agrées par le gouvernement, approvisionnent également
le pays en produits et équipements vétérinaires.
Dans la loi réglementant l’exercice et
l’organisation de la profession vétérinaire, l’article 2 indique entre autres que
la profession vétérinaire, comporte comme disciplines, la médecine, la
chirurgie, et la pharmacie. Cet article indique également que l’exercice de la
médecine, de la chirurgie et de la pharmacie vétérinaires, est réservé aux
seuls médecins vétérinaires qui seuls peuvent détenir des médicaments
vétérinaires en vue de leur cession aux utilisateurs, de leur utilisation
directe ou de leur délivrance au détail.
Il existe au sein de la Direction de
l’Élevage et des Services Vétérinaires, une sous-direction de la pharmacie
vétérinaire et des laboratoires, chargée du suivi et de la mise en œuvre de la
politique gouvernementale et de l’élaboration et du contrôle de l’application
de la réglementation en matière de pharmacie vétérinaire et de médicaments et
autres produits vétérinaires, du suivi de l’activité de pharmacie vétérinaire,
et de la commercialisation des médicaments et produits vétérinaires des
secteurs privés et étatiques et de l’inspection de la pharmacie vétérinaire.
On pourrait
passer en revue plus d’un pays ou la pharmacie vétérinaire est exercée soit par
les vétérinaires et par les pharmaciens soit, dans la plupart des cas par les
seuls vétérinaires. Le cas de la Tunisie
semble être
l’exception qui confirme la règle.
Dr. Khaled El HIcheri
* extrait du livre « la médecine vétérinaire en
Tunisie : passé, présent et avenir » par Dr.El Hicheri
Commentaires
Enregistrer un commentaire