Les zoonoses : prévention et lutte *
Chaque année, des milliers de Tunisiens sont affectés par des maladies zoonotiques transmises entre les animaux et les êtres humains causées par divers agents pathogènes passant d'un animal ou d'un insecte à un humain tels que : virus, bactéries, champignons et parasites ou tout autre agent transmissible.
Ces maladies zoonotiques se manifestent, soit sous la forme d'une maladie mineure à court terme, soit sous la forme d’une maladie majeure parfois léthale ou qui affecte le cours de la vie du malade. Les zoonoses peuvent être causées par divers agents pathogènes C’est ainsi que, sur 1.415 agents pathogènes connus pour infecter les humains, 61% sont zoonotiques. Les humains de leur côté peuvent transmettre des maladies aux animaux ; on parle alors de zoonoses inverses ou d'anthropozoonoses.
Les animaux jouent un rôle essentiel dans le maintien dans la nature, des infections zoonotiques qui affecte les humains, sachant qu’il existe actuellement plus de 200 zoonoses reconnues. Certaines de ces maladies ont une distribution mondiale alors que d'autres sont localisées dans certaines régions du globe. De plus, leur situation n’est pas statique et les zoonoses émergentes sont de plus en plus fréquentes qu’il s’agisse de maladies animales qui se sont récemment propagées à l’homme ou de zoonoses existantes qui se sont répandues dans de nouvelles régions du monde. Ces zoonoses se transmettent de l’animal à l’homme, ou vice versa, par contact étroit entre l'homme et les animaux, contact avec des sécrétions animales, consommation d'aliments ou de boissons contaminés par l'agent zoonotique ou propagation de l'agent par la voie aérienne. Certaines zoonoses sont transmises par des insectes vecteurs (moustiques et tiques, notamment).
De nouvelles zoonoses se manifestent souvent à la faveur de mouvements de populations animale ou humaine en raison de la mondialisation croissante, de changements climatiques ou de crises de diverses natures.
L'incidence des infections zoonotiques sur la santé publique dépend de nombreux facteurs, notamment la prévalence d'animaux infectés, le mode de transmission de l'agent zoonotique et l'étroitesse du contact entre l'animal hôte et l'homme. Cette incidence peut être amoindrie mais de nombreux facteurs s’y opposent dont notamment la sous-notification des suspicions de cas, bien que les prévalences de ces maladies soient très importantes. Vient ensuite le fait que ces zoonoses font l’objet de programmes assujettis à un financement assez lourd et dont la durée est aléatoire, ce qui pose à long terme la question de leur pérennité et donc de leur efficacité finale.
Enfin, certaines zoonoses ont tendance à se présenter sous forme de cas sporadiques ou d’endémie, tandis que d'autres se présentent sous forme d'épidémies et d’épizooties.
La prévention de ces maladies ne peut se concevoir sans l’éducation et la sensibilisation du public ni sans la surveillance épidémiologique. Malheureusement, malgré la mise en place de réseaux de surveillance épidémiologique, la collecte de données humaines et animales est réalisée de manière indépendante, sans coordination ni échange d’informations et avec des résultats peu satisfaisants, illustrant le peu de communication entre les services concernés des ministères de la Santé Publique et de l'Agriculture.
En outre, bien que le risque et, dans une certaine mesure, la prévalence soient très importants, la surveillance de plusieurs zoonoses est sujette à de nombreux aléas dont spécialement la sous-notification déjà signalée de cas d'infections endémiques.
Ce ne sont pas là les seules difficultés que rencontrent les systèmes de surveillance des zoonoses. Il convient d’y ajouter le manque d’informations fidèles et actualisées, le manque de rapports sur la situation sanitaire, la collecte d'une quantité trop importante d'informations sur un nombre excessif de maladies, ce qui rend impossible ou trop tardive l’exploitation des données recueillies. Par ailleurs, le personnel chargé de collecter l’information n’a pas toujours une idée de l'utilisation finale de ces données car il n’a pas été sensibilisé à l’importance de son action et ne reçoit pas d'information en retour. De ce fait, ce personnel considère les maladies endémiques comme un phénomène normal de la vie du troupeau et n'en rapporte pas l'existence alors qu’il doit, en principe, signaler rapidement tout changement de leur statut.
A cela, s’ajoute le fait qu’à tous les niveaux de la chaîne administrative, l'information sur les zoonoses n’est pas considérée comme prioritaire ainsi que le manque de transparence dû au fait que le signalement des zoonoses puisse être perçu comme pouvant être à l'origine d'embargos commerciaux sur le bétail et sur ses productions et affecter le tourisme.
La prévention et la lutte contre les zoonoses sont des activités de première nécessité, considérant l’importance des répercussions de ces maladies sur la santé publique. Seule La concertation et la coopération entre épidémiologistes vétérinaires et médecins épidémiologistes peut barrer la route à la propagation de ces maladies et aux pertes qu’elles provoquent.
Dr. Khaled El Hicheri
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