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La maladie hémorragique épizootique

La maladie Hémorragique Epizootique 

L’EHD (Epidemic Hemorragic Disease) est une maladie virale causée par un arbovirus infectieuse, non contagieuse, à transmission vectorielle des ruminants domestiques et sauvages, principalement du cerf de Virginie et des bovins. Les moutons, les chèvres et les camélidés peuvent également être sensibles, mais ne présentent pas de signes cliniques. Le diagnostic différentiel doit être fait avec la fièvre catarrhale ovine (FCO). 

L’EHD est une arbovirose inscrite sur la liste de l'OMSA (organisation mondiale de la santé animale), qui affecte aussi bien les ruminants sauvages (cervidés) que les ruminants domestiques (bovins) par morsure de petits moucherons hématophages, les Culicoïdes. Les arbovirus sont essentiellement des virus zoonotiques, c'est-à-dire à réservoir animal décrivant un cycle enzootique ou sylvatique impliquant uniquement l’arthropode vecteur et l’animal. L’Homme représente un hôte accidentel pour le virus lorsqu’il vit à proximité du réservoir animal constitué d’animaux sauvages et domestiques. 

Les arboviroses concernent préférentiellement les régions tropicales et subtropicales où leur incidence a considérablement augmenté mais toutes les arboviroses ne sont pas tropicales. C’est le cas du virus West Nile qui a émergé pepuis plusieurs années chez nous et en Europe. Cette émergence ou réémergence des arboviroses est liée à l’adaptation de leurs vecteurs à de nouvelles aires géographiques plus septentrionales, du fait du réchauffement climatique et de l’intensification des voyages et des échanges, favorisant le déplacement de vecteurs ou d’animaux infectés. 

L’EHD circule en Tunisie où elle a été détectée pour la première fois dans des élevages de bovins en 2006 (sérotype 6), puis en 2015 (sérotype non identifié), et en 2021 (sérotype 8) après plusieurs années sans détection entre chaque épisode. La dernière épizootie s’est répandue en 200 foyers dans tout le pays et provoqué d’importantes pertes économiques.. 

Les symptomes : Cette maladie est potentiellement mortelle et provoque de la fièvre, de l’anorexie, des boiteries et une détresse respiratoire. Les petits ruminants peuvent aussi être porteurs du virus, mais aucun cas symptomatique n’a encore été détecté.  

Transmission : Le virus EHD (EHDV) est transmis entre hôtes ruminants par des espèces de moucherons piqueurs du genre Culicoides. Les infections d’EHD sont donc saisonnières. Le cerf de Virginie est l’espèce la plus gravement touchée, la forme suraiguë ayant un taux de mortalité élevé. Chez les bovins, les signes cliniques sont rares, mais des symptômes de fièvre, d’anorexie, de dysphagie, d’émaciation, de stomatite ulcéreuse, de boiterie, de détresse respiratoire et d’érythème du pis ont été rapportés. Le virus de la maladie hémorragique épizootique a été découvert aux États-Unis en 1955. Il affecte principalement les cerfs de Virginie et les bovins domestiques. Le virus s’est depuis répandu en Asie, en Australie et en Afrique, mais, jusqu’à l’année dernière, aucun cas n’avait été détecté en Europe. La maladie hémorragique épizootique a été détectée pour la première fois en Europe fin 2022. Plusieurs troupeaux de bovins ont depuis été touchés en Italie et en Espagne. L’hypothèse la plus probable est que des moucherons ont été transportés des pays du Maghreb à travers la Méditerranée par le vent. Cela expliquerait l’apparition simultanée de la maladie dans plusieurs endroits d’Europe du Sud. Cette extension de la maladie à l’Europe est une conséquence directe du rechauffement climatique, qui permet aux moucherons vecteurs de survivre dans les régions septentrionales. 

Vaccin : Il existe 7 sérotypes différents du virus. Celui qui a circulé en Tunisie en 2021 appartient au sérotype 8. Ce sérotype n’avait pas été détecté depuis son apparition en 1982 en Australie. Aucun vaccin contre ce sérotype n’est disponible à ce jour. En attendant le développement d’un vaccin, la seule mesure pour freiner la propagation du virus est de tester les animaux et d’interdire le transport de ruminants depuis les zones infectées, mais son efficacité reste faible. Afin de détecter l’arrivée du virus sur le territoire tunisien, une surveillance aurait du être mise en place, avec pour objectif d’analyser tout animal suspect, notamment dans la faune sauvage (en priorité, les cervidés) et sur d’autres espèces d’herbivores tels que les camélidés. 

Epidémiologie: l’EHD a émergé au Maghreb en 2006 et au Moyen Orient (Turquie, Israël et Jordanie), générant de nombreuses pertes dans les élevages. L'émergence simultanée de l'EHDV en Tunisie, en Algérie et au Maroc, a suscité une vive inquiétude chez les éleveurs tunisien, qui avait déjà subi d’autres épizooties d’arbioviroses telles la peste équine africaine en 1960 et la fièvre catarrhale ovine en 1999, devenue depuis endémique. Depuis 2006 l'EHDV-6 circule chez les bovins. Chez le dromadaire, espèce sensible au virus de la fièvre Catarrhale ovine, le rôle de réservoir potentiel pour le virus de l’EHD a été évalué. Cette espèce ne semble pas jouer un rôle dans l’épidémiologie de l’EHD. Certains travaux pourraient être poursuivis pour évaluer le rôle du dromadaire comme réservoir d’arbovirus et mieux déterminer les espèces de l'inventaire des Culicoïdes impliquées dans la transmission des arbovirus. 

Le diagnostic est effectué par mise en évidence du virus ou de son génome ou, plus tardivement, par détection d'anticorps spécifiques. 
Le diagnostic clinique est établi par l’éleveur ou le vétérinaire à la vue de symptômes cliniques. La suspiscion de cas doit être confirmée par des examens de laboratoire. 
Le diagnostic différentiel de l’EHDV doit se faire avec la la Bluetongue, la stomatite vésiculeuse, l’ecthyma contagieux ou la fièvre aphteuse. 
Le diagnostic sérologique repose sur : l'immunodiffusion en gélose, la séroneutralisation et le test ELISA dans le but de déceler la présence d’anticorps spécifiques anti EHDV. La présence d’anticorps peut durer plusieurs années. 
Le Test d’immunodiffusion en gélose ou test AGID a été largement utilisé pour la détection d’anticorps spécifiques à l’EHDV à partir du sérum d’animaux infectés. Si le sérum contient des anticorps spécifiques, des complexes immuns formés précipitent et deviennent visibles dans la gélose après 24 heures d’incubation. Ce test est déconseillé quand l’EHDV et le BTV se trouvent dans la même zone. La séroneutralisation permet de déterminer l’identité du sérotype contre lequel sont dirigés les anticorps neutralisants. C’est la technique la plus fiable. Son utilisation dans le cadre d'une surveillance, sur un nombre important de prélèvements est difficile 
Le Test ELISA Plusieurs techniques d’ELISA ont été développées par les industriels en utilisant comme antigène, à la fois la particule virale entière et les protéines recombinantes C’est le test le plus développé à l'heure actuelle et recommandé par l’OIE 
Le Diagnostic virologique repose sur des techniques permettant de retrouver directement le virus ou son génome, qui peuvent être réalisées sur des prélèvements biologiques de différentes natures : sang, rate, poumons, nœuds lymphatiques de carcasses infectées 
Le Test d’isolement viral. à partir de prélèvements biologiques repose sur l'inoculation intraveineuse à des œufs de poule embryonnés de 9/11 jours. Le virus, présent dans le prélèvement se multiplie et provoque la mort de l'embryon entre 2 et 7 jours post inoculation. Les œufs sont alors ouverts et des lésions hémorragiques sont observées. 
Le Test par PCR permet la détection de l'ARN de l’EHDV lors d'une PCR conventionnelle ou d’une PCR en temps réel. Des kits commerciaux de RT-PCR en temps réel sont disponibles et détectent tous les sérotypes connus d’EHDV, dès le 2è jour post-infection. L’outil de diagnostic moléculaire remplace l’outil de neutralisation virale pour déterminer le sérotype. 

Aucun traitement spécifique n'est disponible. A la suite de ces infections persiste une immunité spécifique et durable. On connaît une centaine d'arbovirus pathogènes pour l'Homme, par exemple ceux de la fièvre jaune, de la dengue, de l'encéphalite japonaise, de la fièvre de la Vallée du Rift, les virus West Nile, Chikungunya, etc.. 

Dans leur grande majorité, les arboviroses humaines sont contractées accidentellement à partir d'un réservoir animal, par l'intermédiaire de la piqûre d'un arthropode vecteur (moustique, phlébotome, tique, ...). La plupart des arboviroses s’observent en zone intertropicale, mais quelques unes existent dans les régions tempérées, notamment en Europe. 

Le comité scientifique de MVI

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