Le rôle des médecins vétérinaires dans la protection du
milieu et de l’environnement
Le développement de l’élevage et
l'intensification des productions animales pour répondre à la demande du
marché, en produits alimentaires d’origine animale, entraine, une demande plus
importante de services de santé animale. Or, ce développement et cette
intensification peuvent être à l’origine d’une utilisation irrationnelle des
parcours, d’abus dans l’utilisation des terres dans le cadre d’assolement
irréfléchis et d’une utilisation
abusive de pesticides et de produits vétérinaires. Ces abus aboutissent à la
modification de l’équilibre écologique, à la production de
différents types de déchets qui entraînent la pollution de l’environnement, la contamination de la nappe phréatique et à la concentration des résidus toxiques
dans les produits alimentaires d’origine animale.
Cet environnement dans
lequel évoluent les vétérinaires est dénaturé par les rejets et déchets animaux
(fumier, litières ou déjections de volailles, lisier et cadavres) par l’utilisation abusive des pesticides et le recours à des additifs
alimentaires à des fongicides, des désinfectants et des produits
antiparasitaires. Par ailleurs, l'utilisation de substances antimicrobiennes, à
des niveaux sous thérapeutiques et d’aliments médicamenteux dans l'alimentation
animale aboutit à des phénomènes d’antibiorésistance et à la présence de
résidus dans les produits animaux destinés à l'alimentation humaine, entrainant
des risques toxicologiques et microbiologiques. Tous ces produits constituent
des risques potentiels non négligeables pour la santé publique mais leur
présence dans les viandes, le lait, les œufs et autres produits animaux, ne font
pas encore l'objet de contrôle généralisés.
D’autre part, les
activités de santé animale collectives, telles que les campagnes de
vaccination, aboutissent à l’augmentation des effectifs et à la pression du
cheptel sur les parcours, ce qui contribue à la dégradation et à la réduction
de la fertilité des sols et finalement à leur érosion et à la leur
désertification. Le risque d'une
évolution écologique défavorable est
grand. Par ailleurs, la lutte contre les maladies animales si elle a un
effet positif certain sur la préservation des effectifs animaux et sur leur
productivité, a également un effet négatif car elle a pour conséquence
l’augmentation des effectifs, et la pression du cheptel sur les parcours.
L’équilibre écologique est
également menacé. La lutte contre des espèces animales vectrices de pathogènes
fait apparaître des souches d'agents pathogènes résistantes ou contribue au
déséquilibre écologique comme cela a été le cas au Mexique où l'empoisonnement
des coyotes pour lutter contre la rage a entraîné une prolifération
catastrophique du lapin de garenne qui constitue maintenant un danger pour
l'agriculture.
Au vu de cette situation,
le rôle des vétérinaires s’avère crucial dans la protection de l’environnement
et le maintien des équilibres écologiques car ils se trouvent dans une position
charnière entre villes et campagnes, entre animaux domestiques et animaux
sauvages, et entre santé animale et santé publique. Ils peuvent intervenir dans
les systèmes de production industrielle, d’abattoirs ou d’unités de
transformation des produits de l’élevage, en réalisant les enquêtes officielles requises
préalablement aux autorisations
d’installation, selon des règles strictes visant à limiter les risques
de pollution environnementale.
L’expertise des vétérinaires peut également être sollicitée pour la réalisation
de diagnostics d’environnement de l’exploitation et de mises aux normes des
bâtiments d’élevage et pour la maîtrise des rejets des élevages et des
déchets médicamenteux. La réalisation de ces diagnostics nécessite toutefois la
contribution de vétérinaires spécialisés car ils exigent une formation
particulière que les vétérinaires praticiens peuvent suivre dans le cadre de la
formation continue. L’intervention des vétérinaires peut aussi se faire dans
l’organisation, l'utilisation ou l'élimination sans danger des rejets des
élevages avicoles industriels qui, traités selon des méthodes appropriées,
peuvent constituer des sous-produits intéressants
La planification réfléchie des interventions de
santé animale est devenue une nécessité et doit tenir compte des conséquences
sur l'environnement. Elle relève de la responsabilité des vétérinaires en
charge des services officiels. Il est essentiel que toutes les personnes qui
participent à l’application des programmes de santé animale, à la manipulation
et à l'administration de produits vétérinaires soient bien informées du danger
potentiel qu'ils peuvent représenter pour l'environnement et des conséquences
sur la santé de la population.
Plus proches de la nature, les médecins
vétérinaires, utilisent, pour la détection précoce des risques liés à
l’environnement, des animaux sentinelles pour déceler les résidus toxiques sur
ces animaux qui partagent le même milieu que l’homme, qui s’alimentent à partir
de ce milieu et qui peuvent accumuler dans leur organisme des pesticides, des
insecticides, des métaux lourds ou des contaminants radioactifs. Ces animaux
permettent de déceler plus facilement ces substances indésirables et de
prendre, à temps, les mesures nécessaires de prévention et de contrôle. C’est
notamment le cas du lait et du miel qui peuvent être des révélateurs de la
présence, dans notre environnement, de produits dangereux pour la santé de
l’homme.
Les vétérinaires ont également un rôle à jouer
dans le contrôle de l'importation, l'homologation, la distribution et
l'utilisation des pesticides et des produits vétérinaires et en organisant des
séminaires et les cycles de formation sur la présence de résidus dans les
produits animaux pour sensibiliser les utilisateurs à la manipulation et aux
méthodes d'application de ces produits.
Les vétérinaires privés
peuvent participer, en tant que conseillers, à une démarche qualité concernant
la gestion des déchets, dans le cadre de plans de gestion environnementale et
de maîtrise des pollutions d’origine animale et effectuer des audits
d’environnement et des écobilans.
Ces diverses missions
posent le dilemme partenariat/indépendance. En effet, alors même que les
vétérinaires ruraux sont présentés comme des partenaires fondamentaux des
filières de productions animales, comme les garants de la santé et du bien-être
animal, capables de surveiller et de maîtriser les risques sanitaires, ces
mêmes hommes, par souci de transparence et d’indépendance, pourront difficilement
intervenir au sein de leur clientèle pour réaliser des missions débouchant sur
des classifications, qualifications ou autre certification qui peuvent aller à
l’encontre des intérêts de leurs clients. Ces missions pourront être confiées à
des vétérinaires évaluateurs ou auditeurs dont il conviendra de définir le
rôle.
Les consommateurs, de leur côté, attendent des
producteurs qu’ils leur fournissent des aliments sains et de bonne qualité
nutritionnelle. Ils comptent sur les médecins vétérinaires pour maitriser et
garantir leur salubrité et leur qualité. Ils souhaitent que l’élevage et
l’industrie des productions animales se fassent dans de bonnes conditions
d’hygiène et dans le respect de l’environnement, que les soins aux animaux
soient donnés à l’aide des thérapeutiques les plus récentes et que la lutte
contre les zoonoses soit assurée dans les meilleures conditions et en étroite
collaboration avec les responsables de la santé publique. Ces exigences
interpellent la profession vétérinaire qui est sollicitée pour accomplir ces
multiples missions dans le respect du bien-être animal de la préservation du
milieu et des intérêts des éleveurs.
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