Fièvre
du Nil Occidental ou West Nile Fever.
Les médias nationaux et internationaux ont récemment
fait état de la déclaration de trois cas de West Nile
Fever ou fièvre du Nil occidental, dans le gouvernorat de Monastir, faisant
craindre une possible épidémie qui viendrait s’ajouter aux dramatiques
inondations du Cap Bon. Nos concitoyens sont inquiets et se posent des
questions sur cette nouvelle calamité. En fait, il ne s’agit pas là d’une
maladie inconnue des tunisiens et plus particulièrement du corps médical :
médecins vétérinaires et médecins.
La Tunisie a en effet connu trois
épidémies de fièvre de West Nile chez l’homme : en 1997, dans les gouvernorats
de Sfax, Mahdia, Monastir, Sousse et Kairouan où 173 cas de
méningo-encéphalite ont été déclarés dont 8 décès, en 2003, dans les
gouvernorats de Monastir, Mahdia, Sousse, Sfax et Gabès, où 31 cas ont été
déclarés et en septembre 2015 avec la déclaration de 15 cas dont 1 décès dans
les mêmes régions du centre-est du pays. Ces épidémies ont toutes été associées
à une forte pluviométrie et une pullulation de moustiques inhabituelle durant
la période de fin de l’été et du début de l’automne. Ainsi le lien est établi
entre le risque d’épidémie et les inondations des dernières semaines.
En Tunisie toutes les conditions : climat,
plans d’eau et zones humides, abondance d’oiseaux migrateurs et du moustique vecteur,
sont propices à l’apparition et au maintien du virus West Nile. Ce virus est introduit
à partir des zones tropicales via les oiseaux migrateurs, réservoir du virus.
Avant de survoler la Méditerranée, ces oiseaux font souvent escale dans les
zones côtières de Tunisie, sur les plans d’eau des zones humides : lacs, marais
d’eau douce ou saumâtre, lagunes sebkhas et chotts, répartis sur tout le
territoire. Ce passage se fait avant la saison humide sauf si cette période enregistre
une pluviométrie anormalement élevée comme c’est le cas actuellement.
Les moustiques ponctionnent ces oiseaux,
deviennent vecteur du virus puis vont piquer humains et équidés. Les vecteurs
majeurs du virus sont les moustiques appartenant au genre Culex dont plusieurs
espèces sont très répandues en Tunisie.
Cette maladie a été diagnostiquée chez les
équidés dès la fin des
années 60. Des équidés testés ont révélé une forte présence d’anticorps,
témoignage de l’infection. Différentes études et enquêtes sérologiques, effectuées
dans le cadre de thèses de médecine vétérinaires ont démontré que le virus West
Nile a circulé dans le pays avant 1977. Puis une phase de silence
épidémiologique de durée indéterminée s’est installée. Toutefois, les analyses
de sérums équins, récoltés en 2005, prouvent que, parallèlement à l’épidémie
humaine de 2003, il y a eu une circulation virale chez les animaux.
Que savons-nous de cette maladie ?
Dans le monde, le premier cas enregistré, l’a
été en Ouganda en 1937, d’où le nom de la maladie puis la maladie est déclarée
par les USA en 1999. Lors de l’épidémies de 2003, la plus récentes aux USA,
9858 cas sont déclarés dont 264 décès. En 2010, la Grèce et la Russie déclarent
200 cas dont 6 mortels. La maladie est actuellement largement répandue en Afrique, au Moyen-Orient,
en Amérique du Nord, en Europe de l'Est, dans le bassin méditerranéen et en Asie.
Dans les zones tempérées, elle se manifeste à la fin de l'été et au début de l'automne. Depuis quelques années, l’infection par
le virus suscite un regain d’intérêt avec l’apparition de flambées chez l’homme
et les chevaux dans le bassin méditerranéen et l’Europe de l’Est.
La fièvre de West Nile est une méningo-encéphalomyélite virale commune à l’homme et aux équidés transmise par les moustiques. C’est une zoonose ré-émergente car on
assiste depuis quelques années, à une augmentation du nombre de foyers partout
dans le monde et notamment dans les zones tempérées. Elle figure sur la liste des maladies réputées
contagieuses de l’OIE. La maladie est transmise aux humains et aux équidés par
le virus West Nile, via la piqûre de moustiques infecté, du genre Culex qui se
sont nourris de sang d'oiseaux infectés. Ces moustiques piquent dès le
crépuscule et toute la nuit et sont
actifs de septembre à novembre.
Cette virose est entretenue à l’état
enzootique/endémique dans certains foyers naturels grâce à un cycle de
transmission du virus associant oiseaux sauvages comme réservoir et moustiques
comme vecteur du virus. La maladie est révélée chez les équidés et l’homme qui
sont les hôtes secondaires du virus. Ce virus, outre les équidés et l’homme, peut
infecter de très nombreuses espèces mammifères.
L’infection par le virus de West Nile
est la plupart du temps asymptomatique chez l’homme comme chez les équidés et passe inaperçue chez 75% des cas d’infections, mais elle peut être exceptionnellement
mortelle. Les symptômes observés dans environ 20% des cas d’infection sont des
symptômes grippaux avec fièvre,
maux de têtes, courbatures, parfois des douleurs abdominales accompagnées de
nausées et de vomissements.
Dans environ 1% des cas, généralement
des personnes âgées ou immunodéprimées, des formes graves d’encéphalite ou de méningite sont
observées, pouvant entrainer la mort dans 10-15%
de ces cas. L’infection ne se propage pas de
personne à personne ou d’animal à animal
La prophylaxie de la West Nile Fever est une
prophylaxie basée sur la lutte contre les moustiques par les moyens de
désinsectisation. Le diagnostic de la maladie est basé sur les symptômes confirmés
par les tests sanguins. S’agissant d’une maladie virale, on traite généralement
les symptômes, en particulier la fièvre et la plupart des malades guérissent
spontanément au bout d'une semaine.
Les études épidémiologiques et les
enquêtes sérologiques déjà effectuées pêchent par leur dispersion et ne
permettent pas d’avoir une vision globale, dans l’espace et dans le temps, de
la circulation du virus West Nile en Tunisie, Les épidémies de 1997 et de 2003
et les études réalisées sur des sérums récoltés à partir de 2005, prouvent qu’il
y une circulation virale chez les animaux et les humains mais on ignore la
prévalence et l’incidence réelle de la maladie. Seule une enquête nationale
permettrait d’avoir une image globale de la situation dans le pays. Le Centre
National de Vigilance Zoo-sanitaire (CNVZ) est la structure la plus indiquée
pour mener à bien cette mission de santé Publique. Un réseau national de
surveillance impliquant médecins et médecins vétérinaire doit être constitué pour
suivre l’évolution de la maladie, sa prévalence et son incidence.
Dr. Khaled El Hicheri
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