Risques professionnels vétérinaires : LES BLESSURES
PROFESSIONNELLES
Les médecins vétérinaires praticiens en rurale comme en urbaine ou en
clientèle mixte font face, au quotidien, à de multiples risques liés à la
nature de leurs activités professionnelles. Parmi les dommages physiques les
plus fréquents subis par les vétérinaires ont peut classer : les morsures
de chiens, les morsures et griffures de chats, les coups de pieds des bovins et
les ruades des chevaux. Coups de pieds et morsures sont relevés dans les 2/3
des accidents. Parmi les vétérinaires les plus prédisposés, se détachent
statistiquement les fumeurs, les praticiens soignant les grands animaux, les
femmes, ainsi que les vétérinaires présentant un terrain sensible aux
allergies.
Les lésions musculaires et squelettiques ne
sont également pas rares, spécialement lors du soulèvement des grands chiens pour
les placer sur la table d’examen ou la contention lors du couchage et du relevé
des grands animaux ; de même que les poussées et les écrasements par les
grands animaux, fréquents dans la pratique rurale, peuvent également être à
l’origine de déchirures musculaires, de lésions vertébrales voire viscérales.
Les aiguilles à injection, les bistouris et autres instruments vétérinaires sont également causes de blessures. Les coups
d’aiguilles, notamment, par la nature du produit accidentellement injecté, sont
souvent à l’origine de complications septiques ou allergiques. Enfin, il convient
de mentionner que les vétérinaires praticiens peuvent subir des agressions
physiques directes, surtout de la part de bouchers contestant des saisies aux
abattoirs, de clients qui viennent de perdre un animal que le vétérinaire n’est
pas parvenu à sauver ou de toxicomanes en quête de stupéfiants tels la « kétamine »,
un anesthésique communément employé dans la pratique quotidienne vétérinaire.
Les causes des blessures d’après les
statistiques de certains pays, étaient constituées pour 1/3 par les ruades et
autres coups de pied, pour un autre 1/3 par les morsures, et pour d’autres
causes telles que les écrasements, les griffures, les coups de corne et les
coups de tête. Les autres causes signalées se rapportaient aux zoonoses, à
l'auto inoculation de vaccin brucellique vivant, et aux blessures par bistouri
dues aux réactions intempestives de l’animal. Les animaux les plus communément
impliqués étaient pour près de 50% les bovins ; les chiens pour 25% et les
chevaux pour 15%.
Importance et traitement des blessures
des vétérinaires accidentés : une étude statistique par questionnaire, effectuée
aux USA sur des vétérinaires exerçant en rurale sur de gros animaux, dans les
états du nord des USA (Minnesota et Wisconsin) et traités à la suite de
blessures provoquées par des bovins ou des chevaux, a donné les résultats
suivants : près de 70% avaient subi des dommages importants et 17% d’entre
eux avaient été hospitalisés. Parmi ces derniers, 25% avaient subi une
intervention chirurgicale. Des interventions chirurgicales furent fréquemment
nécessaires pour traiter les blessures provoquées par les animaux. Les
blessures de la main sont les plus fréquentes dans la carrière d'un vétérinaire
(53% des répondants), suivies des traumatismes des bras (28%), de la tête (21%),
du thorax (8%), des organes génitaux (4%), et des viscères abdominaux (3%).
Selon cette étude statistique, des blessures beaucoup plus graves ont
été signalées. Dans sa carrière, un vétérinaire sur trois avaient eu besoin de
faire suturer des plaies, 1 sur 10 de faire réduire des fractures ou luxations,
et 1 sur 20 d'avoir recours aux travaux dentaires. Les jours de travail perdus,
consécutifs aux blessures provoquées par des animaux, s'élevaient en moyenne à
8,5 jours durant toute la carrière du vétérinaire. A signaler que l'auto - traitement
des blessures est fréquent chez les vétérinaires dont certains ont réduit
eux-mêmes leurs entorses ou luxations, 1 sur 5 avait suturé ses propres plaies,
et les 2/3 s’étaient administrés eux-mêmes des injections antibiotiques.
Nature des accidents et incidents,
d’après les praticiens interrogés, les points à privilégier pour renforcer la
sécurité de l’intervention sur un cheval sont, dans l’ordre, une bonne
contention physique et chimique, la présence d’aides compétents et en nombre
suffisant, l’anticipation des réactions du cheval, la vigilance du vétérinaire,
des locaux spacieux, adaptés et munis d’une porte de sortie, un environnement
calme, l’absence de précipitation, l’obtention de la confiance du cheval,
l’absence de spectateurs, la connaissance du propriétaire et de ses
compétences, l’absence de fatigue du praticien et son calme, l’imposition de
son propre mode de travail, la bonne préparation des actes et du matériel,
l’absence d’autres chevaux, et l’information des aides sur le déroulement du
protocole d’intervention.
Fréquence des incidents et accidents :
de manière plus détaillée, sur 100 vétérinaires questionnés, 90 ont signalé des
incidents et 31 des accidents ; parmi ceux-ci, les coups de pieds sont les
plus fréquents, suivis des morsures, des écrasements, les bousculades par les
gros animaux et les coups de tête et de cornes. Pour la majorité des
praticiens, les soins sur les membres postérieurs sont les plus risqués ;
viennent ensuite les soins sur la tête, les soins à l’arrière du cheval et les
soins sous le cheval, les opérations chirurgicales animal debout, l’examen d’un
cheval souffrant de colique, les injections intramusculaires et dans une
moindre mesure, les examens cliniques, le couchage ou le relevé d’un cheval.
Les praticiens interrogés afin d’évaluer la fréquence, la gravité des
accidents et leurs facteurs de risque ont donné les réponses suivantes :
sept sur dix ont été victimes d’au moins un accident ; les dommages les
plus fréquents sont les hématomes, les lésions osseuses et les plaies. L’animal
fauteur d’accident est généralement un jeune animal. La majorité des accidents
recensés survient lors d’actes fréquents jugés peu risqués, avec un praticien
peu vigilant. Au dire des praticiens interrogés, seuls 20% de ces accidents
étaient inévitables.
Les accidents d’automobile ont également été
décomptés. Les auteurs signalent en effet la fréquence des accidents
d’automobile, liée évidemment au kilométrage professionnel effectué. Les
vétérinaires effectuent, en moyenne, près de 500 km par semaine, mais il convient
de signaler que la majorité des vétérinaires ruraux ne respectent pas les
limitations de vitesse et une bonne partie d’entre eux n’utilisent pas leur
ceinture de sécurité. Ces accidents sont souvent mortels ou provoquent des
blessures graves aboutissant à des hospitalisations longues et pénibles et
provoquant une réduction sensible des activités professionnels allant jusqu’à
l’arrêt de ces activités.
Les facteurs de risque sont constitués, dans
l’ordre décroissant, par : les aides inexpérimentés, les actes sur la sphère
postérieure, la contention insuffisante, l’inexpérience ou la maladresse du
propriétaire, le mauvais dressage du cheval, le manque de concentration du
vétérinaire ou sa fatigue , les actes sur la sphère antérieure, les actes pratiqués
« sous le cheval », le cheval peureux, le cheval excité, le cheval souffrant,
le vétérinaire pressé, les personnes énervées dans l’environnement immédiat, l’utilisation
du tord-nez, la présence d’autres chevaux autour du patient, le cheval dans un
travail, les gestes douloureux, le stress du vétérinaire, le mauvais matériel
de contention et l’intervention dans un espace confiné.
En complément de ces informations sur la sécurité de l’intervention, une
étude rétrospective sur les blessures des vétérinaires par coups de pied de
cheval, a démontré que la fréquence des dommages était en relation avec un
certain nombre de paramètres bien identifiés : l’expérience professionnelle, le
type d’intervention, la spécialisation (pourcentage de chevaux dans la
clientèle), le lieu d’intervention (stalle, pâturage) et l’éventuelle
contention chimique de l’animal. Les blessures graves survenues sont surtout
consécutives à des soins prodigués hâtivement par manque de temps, ou bien à un
événement imprévu ayant effrayé l’animal lors de l’intervention. Par cette
approche des facteurs de risque, il est possible de diminuer la fréquence des
dommages, notamment par la sédation de l’animal lors de soins douloureux, le
choix d’un lieu sûr d’intervention et le renforcement de la vigilance du
praticien.
Comme on peut le constater, le métier de vétérinaire praticien en
clientèle de gros animaux comme en clientèle d’animaux de compagnie, n’est pas
de tout repos. Le praticien est quotidiennement exposé a toute une gamme de
risques allant des maladies transmissibles de l’animal à l’homme aux radiations
ionisantes en passant par une multitude d’accidents corporels.
Afin de diminuer la fréquence des blessures d’origine animale, il est
indiqué de former les futurs praticiens, lors de leurs études, à l'utilisation
des tranquillisants et au recours aux moyens mécaniques de contention des
animaux.
Dr.
K. El Hicheri
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