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La lutte contre la tuberculose bovine: un fiasco aux graves conséquences



La tuberculose constitue un grave problème de santé publique ; elle avait été combattue efficacement dans la plupart des pays et sa prévalence avait été réduite de manière significative mais on constate actuellement son retour en force, et l’une des causes de la recrudescence des cas humains est la contamination de l’Homme par des animaux infectés et plus particulièrement par les bovins.

La tuberculose bovine est une maladie bactérienne, contagieuse et chronique des animaux et de l’homme qui peut ne pas s'extérioriser même dans ses stades avancés ; le diagnostic est souvent effectué après l'abattage, par un examen de la carcasse et par des méthodes histopathologiques et bactériologiques.

C’est une des plus graves zoonoses, causée par un bacille, Mycobacterium bovis, appartenant au complexe Mycobacterium, qui comprend aussi M. tuberculosis. La maladie peut se transmettre à l'homme et à d'autres animaux. Les personnes qui risquent le plus de contracter la maladie sont celles qui sont en contact direct et prolongé avec des animaux infectés : vétérinaires, éleveurs, travailleurs agricoles. Parmi les voies de contamination de l’homme, outre la voie aérienne, figure l'ingestion de lait ou de produits laitiers non pasteurisés, de vaches infectées.

Quand un cas suspect est signalé chez les bovins, le vétérinaire effectue un diagnostic préliminaire de l'infection par M. bovis, à l'aide du test cutané à la tuberculine. Chez l'homme, la maladie est diagnostiquée par radiographie pulmonaire et cultures des expectorations.

La plupart des pays qui projetaient d’éradiquer la maladie ont appliqué un programme de lutte contre la tuberculose bovine qui consiste en l’application rigoureuse du test à la tuberculine, suivi par l’abattage des bovins réagissant.

En Tunisie, le programme de lutte appliqué, avait pour objectifs l'assainissement des troupeaux infectés et la protection et le contrôle des troupeaux indemnes et/ou assainis. Une enquête épidémiologique, effectuée en 1984, sur 20% des bovins laitiers de race pure avait révélé des taux d'infection des élevages et des bovins, respectivement de 30,7% et 4,8%, dans le secteur organisé, et de 17,2% et 16,6%, dans le secteur privé. Le programme de lutte a permis d’abaisser les taux d'infection des élevages et des bovins du secteur organisé, respectivement à 5,8% et 0,5%. Cette baisse significative des taux d’infection permettait d’espérer qu’à l’issue du programme de lutte notre se serait débarrassé d’une importante source de contamination.

Le programme reposait, depuis 1984, sur le dépis­tage/abattage des bovins réagissant à la tuberculine, et sur l’indemnisation des éleveurs mais le retard apporté, dans les procédures d’indemnisation des éleveurs puis son arrêt, le budget de l’Etat n’ayant pas pris le relai des fonds de contrepartie de l’Union Européenne qui finançaient le programme, a constitué un frein qui a compromis le succès du programme. Les résultats se sont avérés à l’opposé de ceux attendus. La tuberculose bovine continue à sévir. Le rythme d’assainissement des bovins s’était ralenti jusqu’à l’arrêt, faute de fonds, La confiance établie parmi les éleveurs, au prix de gros efforts par l'Administration vétérinaire, s’est effritée. Les vieux réflexes ont alors repris le dessus, l’intérêt immédiat des éleveurs leur dictant de se débarrasser des bovins réagissant, sur le marché, plutôt qu’à l’abattoir, où les carcasses risquaient d’être partiellement ou totalement saisies, ce qui a contribué à étendre la maladie à des élevages jusque-là indemnes. Le taux de prévalence a augmenté, l’incidence de la maladie s’est accentuée et le programme devenu moins performant, par manque d’animation, de motivation et de moyens, s’est étiolé sans atteindre les objectifs initialement fixés. 

Voilà un exemple parfait de projet qui comportait tous les facteurs de succès mais dont un seul élément défaillant a compromis la réussite après tant d’efforts, de temps et de moyens mobilisés.

La réussite des programmes de lutte contre les zoonoses, dont la tuberculose bovine, est intimement liée à la volonté politique, à l’efficacité de l’administration et à l’éducation du public or les autorités exécutives et sanitaires ne s'intéressent aux zoonoses que lorsque l'incidence ou la prévalence est importante ou encore lors d’épizooties ou d'épidémies 

Cet échec retentissant, dont les conséquences économiques et les effets sur la santé de la population sont catastrophiques, nous enseigne toutefois que pour que la lutte contre ces maladies soit efficace, l'approche doit être une approche sur le long terme, après que tous les moyens nécessaires au succès des programmes de lutte, et principalement les moyens financiers, soient réunis.



Il est possible de réduire considérablement la prévalence et l’incidence de la tuberculose bovine sinon de l’éradiquer et de contribuer ainsi à l’amélioration de la santé de la population. Les médecins vétérinaires sont prêts à se mobiliser de nouveau pour assurer le succès de tout programme de lutte dont le financement est assuré sur le long terme.




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