L’économie laitière
L’élevage en Tunisie occupe une place importante dans l’économie tunisienne du fait qu’il contribue à raison de 35-40 % du PIB agricole et 4-5 % du PIB global ; le secteur laitier est un secteur stratégique ; il a contribué en 1998 à hauteur de 22,5% de la valeur de la production animale et de 8% de la valeur totale de la production agricole estimée à 3.270,106 DT. Le secteur lait occupe près de 151.000 éleveurs, représentant 32% de l’ensemble des agriculteurs, et emploie 68% des ouvriers salariés permanents dans le secteur agricole.
Le prix minimum du lait à la production est périodiquement réajusté ; la fixation des prix à la production et à la consommation a toujours constitué une constante pour l'Etat.
Durant les années 50 et 60 l’aide alimentaire de la Communauté Economique Européenne (CEE) nous parvenait sous forme de lait en poudre.Toutefois, le bas prix de de ce produit, s'il a permis le développement d’une industrie laitière basée presque exclusivement sur la poudre de lait d’importation à bas prix, a complétement bloqué le développement d'une production laitière nationale et a eu comme autres conséquences l'accroissement des quantités importées et l'augmentation de la consommation.
La création d’un réseau d’environ 225 centres de collecte de lait a permis l’évolution quantitative de la production laitière. Le lait collecté représente plus de 59% du lait produit.
La stratégie laitière adoptée reposait sur sept actions :
le développement des ressources alimentaires,
l’accroissement des effectifs
l’amélioration des performances du cheptel bovin,
la mise en place de meilleures structures de production et d’encadrement d,
une meilleure couverture sanitaire
l’assainissement des étables des zoonoses majeures
Un meilleur contrôle de la qualité du lait à la production et à la collecte
L’année 1988, durant laquelle ont été importées 522.000 T a été l’année où ont été importées les plus grandes quantitées. Cette aide de la CCE a toutefois permis d'alimenter un "fonds de contrepartie" destiné au développement de l’élevage et de ses productions, en finançant des programmes :
d’amélioration pastorale,
d’amélioration génétique,
de collecte du lait et
de santé animale.
Lorsque le marché international a repris à la hausse, le gouvernement décida de hausser les prix à la consommation et d’effectuer un prélèvement à l’entrée de la poudre de lait dans le pays, ce qui entrainé la réduction des quantités importées. Ces décisions ont permis de faire de la production laitière une spéculation rentable à partir des années 80 ; mais le prix de vente au public du lait cru pasteurisé, ou stérilisé, ont toujours été fixés à des niveaux inférieurs aux cours réels de production par suite des compensations assurées aux centrales laitières. Ce qui a limité la production nationale de lait qui a subi des fluctuations importantes déstabilisant toute la filière
En Tunisie, la filière lait a une importance capitale dans l’économie agricole. d'après le Groupement de la viande et du lait, la production de lait de bovins est passée de 864 M de litres en 2004 à 1218 M de litres en 2014 ; ces résultats ne doivent pas occulter les difficultés rencontrées telles :
- la politique sociale des prix,
la qualité bactériologique du lait à la production et à la collecte, produit sont les principaux objectifs de la filière, tributaires en grande partie des aléas
les conditions d’élevage et de traite.
l'hygiène et l'entretien des machines à traire
la lutte contre les mammites (30% vaches laitières souffrent et 13% d'entre elles sont réformées à cause de mammites incurables.
le maintien du système d'élevage hors sol.
Malgré ces entraves et ces insuffisances, la mise en place d’un ensemble de mesures d'incitation au niveau des maillons de la filière a permis d'atteindre 1100 M de litre en 2010 et 1218 M de litre en 2014, dépassant l'autosuffisance. Malgré la diminution du cheptel bovin laitier, la production laitière a connu un taux de croissance annuel moyen de 1,3%. L'activité de collecte du lait a permis la valorisation de la production laitière, et permis d'atteindre l’autosuffisance en lait UHT grace a l'effet d'entraînement sur le développement du secteur qu'elle a provoqué.
Produire plus et moins cher n’est plus suffisant. Il devient nécessaire de tenir compte, des incidences sur la santé du consommateur et des prix de plus en plus élevés des intrants (engrais chimiques, pesticides, semences…) et surtout de l’énergie et du manque de main d’œuvre agricole qui ne cessent de faire grimper les coûts de production des produits animaux dont le lait. Vu son importance, le secteur laitier a bénéficié depuis le milieu des années 1980, d’un important volume d’investissement passant de 76 MDT le VIIIe Plan à 173 MDT au IXe plan.
Une série de réformes a touché les prix des produits et des mesures d’incitation visant le développement du secteur de la production à la transformation ont été promulguées. Ces mesures dans le secteur laitier ont concerné :
la révision périodique du prix plancher à la production,
la constitution d’une infrastructure de collecte et de transformation,
l’instauration et l’augmentation de la prime de collecte,
l’importation de génisses de race pure,
l’octroi de crédits et subventions pour leur acquisition.
Le secteur laitier a favorablement réagi à cette stratégie par l’accroissement de la production, dépassant ces dernières années les seuils des prévisions des services du ministère de l’Agriculture Le secteur laitier est passé au cours de la période 1997–2001 d’une situation déficitaire à une situation d’autosuffisance en lait de boisson en 1999 puis à un stade excédentaire à partir de 2000. Cependant, quoique ces mesures aient fortement stimulé la production et la collecte du lait, participant ainsi à l’augmentation du taux de couverture de la demande par la production nationale (86% en 1996 et 100% en 2000) et un allégement du déficit de la balance alimentaire, elles souffrent de certaines insuffisances du fait qu’elles n’ont pas été suivies par d’autres mesures concernant la conduite et surtout l’alimentation du troupeau laitier.
La Tunisie, auparavant importatrice de lait en poudre pour la fabrication du lait régénéré, est actuellement importatrice de reproducteurs, de matériels d’élevage et surtout d’aliments pour bétail (maïs, tourteaux de soja, orge, etc.). L’encouragement à la production laitière était basé sur une subvention de l’ordre de 50% du prix de revient des aliments concentrés importés. L’augmentation de la production laitière s’est donc faite sans intégration de l’élevage laitier dans le système de production ; les superficies fourragères n'évoluant pas au rythme de l’effectif des animaux.
Malgré la suppression en 1992 des subventions à l’importation des concentrés entrant dans la fabrication des aliments composés, on observe toujours un accroissement de ces importations. Ceci s’explique par le développement continu du système d’élevage hors-sol basé sur l’utilisation massive du concentré. Même pour les systèmes relativement intégrés, on observe un taux élevé d’utilisation du concentré qui est devenu l’aliment de base de la ration et non le foin. La part importante du concentré dans l’alimentation du cheptel laitier en Tunisie a entraîné une sensibilité plus forte de l’offre laitière au coût de la ration qu’au prix du lait. Le concentré représente à peu près 40 à 48% de l’ensemble du coût d’alimentation qui varie en fonction du niveau d’intégration de l’élevage au système de production de l’exploitation.
En raison du manque de matières premières locales, les aliments composés dépendent de matières premières importées. En conséquence, la production du lait en Tunisie est dépendante de la disponibilité de ces produits sur le marché international et des fluctuations des cours mondiaux. Quant à l’orge, les importations varient en fonction des conditions climatiques. Lors des sécheresses, elles augmentent et le pays importe aussi du foin et de la luzerne.
Bien que la stratégie mise en place en vue de couvrir les besoins nationaux en lait soit sur la voie de la concrétisation, certaines analyses économiques sont incontournables afin de mieux cerner la rentabilité des différents systèmes d’élevage laitier et de prévoir les retombées possibles de certaines mesures de politique agricole sur l’évolution de cette rentabilité.
Dr. Khaled El Hicheri
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