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Maladies émergentes et ré-émergentes

 

Maladies émergentes et ré-émergentes

Les coronavirus animaux qui n’infectent que les animaux ont rarement, émergé pour infecter les humains et provoquer des épidémies, ce qui est pourtant le cas du SARS-CoV2 qui a franchi la barrière entre espèces et provoqué une maladie chez les humains. C’est là un cas typique de maladie dite « émergente ».

La nouvelle souche de Coronavirus issue d’une mutation du SARS-CoV2, responsable de Covid-19, n’a pas surpris les épidémiologistes, considérant le nombre phénoménal de réplications qu’a subi ce virus durant plus d’une année de pandémie. Rappelons à cet effet que « les trois virus émergents (SRAS, MERS, COVID-19) qui l’ont précédé ont tous pour ancêtres des virus isolés chez différentes espèces de chauves-souris. Ils ont vraisemblablement franchi la barrière inter-espèces en passant d’abord par un mammifère (civette dans le cas du SRAS, les camélidés dans le cas du MERS et le pangolin pour le COVID-19), puis à l’Homme »*. Il n’est pas étonnant que le SARS-CoV2, tant qu’il continuera à se multiplier et à occuper le terrain, soit l’objet d’autres mutations, produisant de nouvelles souches et il n’est pas évident que les vaccins actuels puissent protéger contre ces souches.  

Les maladies émergentes sont des maladies nouvelles contrairement aux maladies ré-émergentes qui ont existé puis ont été éradiquées ou se sont éteintes d’elles-mêmes et qui réapparaissent, tel le paludisme, dans une région antérieurement indemne, où les anophèles se sont multipliés de manière inexpliquée – qui sont généralement des maladies infectieuses, également caractérisées par leur contagiosité et leur gravité. Plus de 30% des décès dans le monde et particulièrement dans les PVD, leur sont imputés.

Ce type de maladies s’est manifesté en plus grand nombre dès les débuts du siècle dernier aussi bien chez les humains que chez les animaux ou chez les deux à la fois sous forme de zoonoses (maladies transmises de l’animal à l’espèce humaine). Cette augmentation est en corrélation étroite avec l’extension des zones de prolifération des vecteurs du virus en cause tels les moustiques, les tiques ou les moucherons (cas des leishmanioses, de la Rift Valley Fever ou de la Malaria) qui transmettaient les pathogènes des réservoirs - constitués dans 70% des cas par les animaux de la faune sauvage - aux animaux domestiques et aux humains.

Cette augmentation est également liée à la mondialisation, à l’intensification et à la rapidité des échanges dues à la croissance fulgurante des transports rapides sur de longues distances. Les bateaux, les avions et les trains sont les moyens de transport qu’empruntent les virus, les bactéries et les rickettsies responsables de ces maladies et les ports, les aéroports et les gares sont les portes d’entrées de la plupart des maladies émergentes qui nous viennent, le plus souvent, d’Asie ou d’Afrique.

C’est ainsi que le nombre des zoonoses a été multiplié par 4 depuis un demi-siècle et que ces zoonoses sont nettement plus fréquentes depuis quelques décades. Dans les années 80, les maladies transmises par des insectes et les acariens étaient en nette augmentation et plus de 60% de ces maladies étaient des zoonoses. Bien que les maladies émergentes les plus connues par le grand public soient des maladies virales - VIH/Sida, le SRAS, le Chikungunya, la Grippe aviaire, Ebola, la Fièvre de la vallée du Rift, le syndrome pulmonaire dû au hantavirus, ou la West Nile Disease (15 cas en Tunisie dont1 mort en 2012) - n’y a pas que les virus qui soient en cause ; dans 50% des cas les maladies émergentes sont causées par des bactéries (la maladie de Lyme) ou des parasites (le paludisme).

Le risque de voir émerger de nouvelles maladies ou de voir réémerger des maladies que l’on croyait disparues, est de plus en plus grands, provoqué par l’action de l’homme telle que la déforestation et la destruction des écosystèmes, la désertification, les animaux exotiques de compagnie, la chasse, le voisinage d’élevages, les laboratoires pratiquant l'expérimentation animale et même le tourisme. La multiplication des maladies infectieuses émergentes est favorisée : par l’instabilité dans certains pays où des foyers de guerre existent, par le dérèglement climatique avec alternance de périodes de sècheresse ou d’inondation, par l’érosion de la biodiversité, par une modification importante du couvert végétal et de l’utilisation du sol et par l'introduction d’espèces animales exotiques, porteuses de microbes ou de parasites pathogènes.

Pour faire face aux risques sérieux d’émergence de nouvelles maladies infectieuses, l’OMS a construit un « réseau des réseaux » afin d’assurer une veille sanitaire mondiale pour une détection rapide des agents pathogènes à l’origine de ces maladies. Ce réseau comprend le réseau mondial d'information en santé publique, la Croix Rouge, le Croissant Rouge, Médecins sans Frontières, Medical Emergency Relief International et diverses missions dans les pays émergents. La bonne gestion de cette veille sanitaire se base sur le système mondial d’alerte précoce (Global Early Warning System) et le développement de la surveillance syndromique par un comité scientifique sur les risques émergents, et nouvellement identifiés, pour la santé.

Dr. Khaled El Hicheri

*article sur les coronavirus paru sur le blog de MVI

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