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risques professionnels vétérinaires/ INTRODUCTION

 

Risques professionnels vétérinaires : INTRODUCTION

Le visage de la profession a changé, depuis quelques décades notamment par la « féminisation » et par l’augmentation de la proportion des vétérinaires praticiens dont la clientèle est exclusivement consacrée aux animaux de compagnie, ceux qui se consacrent aux élevages industriels de volailles et, par la diminution du nombre des vétérinaires ruraux, dont une bonne proportion a maintenant une clientèle mixte, rurale et urbaine pour animaux de compagnie. De ce fait, la proportion et la nature des accidents et des risques professionnels a suivi ces changements et l’on voit apparaitre dans ces pays une bonne proportion de risques cancérogènes ou de suicides, de surmenage (burnout) et de stress.

 

Les médecins vétérinaires exercent leur art sur une grande variété d'espèces animales, généralement dans les exploitations agricoles, les fermes d’élevage, les élevages industriels, les cabinets et cliniques vétérinaires, les laboratoires de recherche et de biologie vétérinaires, les zoos et les structures abritant des animaux sauvages en captivité. Dans tous ces lieux et avec tous ces animaux de toutes tailles et de tous âges, ces vétérinaires font face à de nombreux risques professionnels, notamment les maladies zoonotiques, les morsures, les griffures, les ruades, les coups de corne, les médicaments dangereux, les piqûres d'aiguilles, les rayonnements ionisants et le bruit. Dans la réalité quotidienne de la pratique vétérinaire, rares sont les vétérinaires interrogés qui n’aient pas eu à pâtir d’un ou de plusieurs de ses risques.

Contrairement à l’image idyllique véhiculée par la littérature, le cinéma, les séries télévisées et les médias – image qui a marqué l’esprit de bien des enfants et qui est probablement à l’origine de bien des vocations - le métier de vétérinaire n’est pas aussi facile. Dans sa vie professionnelle, et quelles que soient les précautions prises, le vétérinaire s’expose quotidiennement à des risques pouvant entraîner des dommages aux conséquences parfois graves et durables. Depuis son intégration à l’École vétérinaire jusqu’à sa retraite, le vétérinaire praticien est confronté à ces risques durant toute notre carrière. Les organismes statutaires ainsi que les associations professionnelles doivent le sensibiliser et lui faire prendre conscience de ce sujet essentiel et souvent ignoré.

Les maladies transmissibles de l’animal à l’homme ou zoonoses : une revue systématique des étudiants vétérinaires dans plusieurs pays a révélé qu'entre 17 et 64% des étudiants avaient contracté une maladie zoonotique au cours de leurs études. L'espèce animale, le milieu de travail, les pratiques de santé et de sécurité physique et biologique, et la formation peuvent tous avoir une incidence sur le risque de blessure et de maladie. Les morsures, les griffures et autres égratignures d'animaux constituent des blessures courantes sur les lieux de formation et dans la pratique vétérinaire.  Les interactions étroites avec les animaux exposent les vétérinaires à un risque accru de contracter des zoonoses.

Les blessures par piqûre d'aiguille sont les accidents les plus courants chez les vétérinaires, mais ils sont considérés comme négligeables et sont probablement sous-déclarés. Les piqûres d'aiguilles peuvent toutefois entraîner des expositions à des médicaments dangereux ou à des agents pathogènes transmissibles par le sang. Contrairement aux professionnels de la santé humaine, les vétérinaires reçoivent à l'école, une formation réduite sur la manipulation sécuritaire des médicaments dangereux.

Les risques d’infertilité : un bon pourcentage de vétérinaires sont des femmes en âge de procréer et les expositions aux médicaments les exposent à un risque d'infertilité ou à d'autres problèmes de procréation et de santé. En outre, certains antibiotiques, stéroïdes et médicaments de chimiothérapie sont connus pour avoir des effets négatifs sur la fertilité masculine. C’est ainsi que, dans plusieurs pays, les autorités publient régulièrement des directives sur la manipulation sans danger des médicaments dangereux pour les vétérinaires et leur personnel.

Le suicide : parmi les risques inventoriés dans le monde vétérinaire, le risque de suicide figure en bonne place. Les vétérinaires ont des taux de suicide élevés par rapport à la population générale. Une étude a révélé que les vétérinaires hommes sont 2,1 fois et les femmes vétérinaires sont 3,5 fois plus susceptibles que la population générale, de mourir par suicide. Parmi les raisons figurent la surcharge de travail, les appels d’urgence la nuit, les attentes et les plaintes des clients, les procédures d'euthanasie et un déséquilibre entre vie professionnelle et vie privée. Une enquête auprès de plus de 11 000 vétérinaires aux USA a révélé que la durée de vie d'un vétérinaire est inférieur à celle d'un médecin et que 9% des vétérinaires souffraient d’une détresse psychologique grave, 31% avaient des épisodes dépressifs, 17% ont pensé au suicideL’environnement professionnel tunisien est loin d’être le même que celui du Minnesota et ces pourcentages, s’ils nous donnent une idée sur les raisons qui pousseraient les vétérinaires au suicide ne peuvent être transposés telles quels en Tunisie.

Les risques d’accidents professionnels vétérinaires peuvent être regroupées en plusieurs groupes : les blessures comme les coupures par lames de bistouri, les piqûres par aiguilles à injection (avec leurs éventuelles conséquences septiques et allergiques), les piqûres par aiguilles à suturer, les luxation, entorse du genou, hernie discale, déchirures musculaires, les chutes, les charges de béliers ou de boucs et autres animaux.

Au plan général, en clientèle d’animaux de compagnie, les griffures et morsures dues aux chats sont fréquentes. En fonction du type de clientèles, on constate que les vétérinaires praticiens exerçant en clientèle mixte sont plus exposés aux atteintes par griffures ou morsures de chats que les praticiens soignant exclusivement des petits animaux.

En dehors des accidents cités, les médecins vétérinaires et leurs personnels sont également exposés à des maladies professionnelles, infectieuses et parasitaires graves qui seront traitées dans un article à part.

Ces blessures, ces accidents et ces infections ont un impact important sur la santé et la carrière des vétérinaires praticiens et les organisations professionnelles doivent sensibiliser leurs adhérents à ces risques. La sensibilisation est l'étape la plus importante pour promouvoir la santé et la sécurité des vétérinaires sur leurs lieux de travail. Les pratiques vétérinaires comme bien d’autres activités, ont besoin d'un plan de santé et de sécurité qui traite de la prévention des infections et des autres dangers auxquels sont exposés leurs auteurs. Le bruit que l’on oublie souvent de citer, peut constituer une exposition importante de perte auditive. Une étude sur le bruit des animaux dans les élevages industriels ou les chenils a révélé que les niveaux de bruit dépassaient souvent la limite d'exposition admissible. La réduction du bruit est bénéfique pour la santé animale et humaine. Ces lieux de travail devraient subir des contrôles techniques et administratifs et leurs personnels être pourvus d’équipements de protection individuelle tels que les gants, les lunettes de sécurité, les blouses de laboratoire et les protections auditives. Une formation obligatoire doit être fournie sur l'utilisation appropriée de ces équipements de protection.  

Dr. Khaled El Hicheri

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