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Que faire de la laine des ovins

Que Faire de la laine des ovins

Le mois de juin titre à sa fin, la saison de la tonte des moutons est terminée depuis déjà plus de deux semaines. La saison de reproduction est déjà bien entamée et les premiers agnelages auront lieu au début de l’automne prochain. Les exploitants et les bergers sont à la recherche de débouchés pour la laine collectée mais le marché de la laine n’est plus aussi porteur qu’ils l’espéraient. 

Réalisée entre début mars et début juin, la tonte des ovins prépare les brebis aptes à la reproduction, à l’introduction des béliers et le démarrage de la lutte. De plus, la tonte de la laine a soulagé les animaux de leurs toisons, en vue des chaleurs estivales. La tonte est normalement un événement pour les moutonniers, les familles de bergers autant que pour leurs moutons. La laine était une valeur sure. C’est aussi un acte indispensable qui a lieu une fois par an mais devient de plus en plus onéreux À cela, s'ajoutent les repas des équipes de tondeurs et leur frais de transport (les professionnels se faisant de plus en plus rares, certains tondeurs viennent de loin et sont exigeants).

Il y a quelques années, la tonte permettait en effet aux moutonniers et aux familles de bergers d'obtenir un bon revenu complémentaire. Un mouton bien portant produit annuellement environ 3 kilos de laine. La vente de la laine payait donc largement la tonte. Désormais, la laine n'est plus valorisée autant qu’auparavant et la tonte constitue une charge supplémentaire, souvent sans contrepartie ; bientôt elle fera partie des déchets de l’élevage des ovins dont on ne sait pas de quelle manière se débarrasser, à l’image de ce qui se passe pour les peaux des moutons sacrifiés le jour de l’AId El Idha (traduite par fête du sacrifice) qui ne trouvent pas preneur et que l’on retrouve dans les poubelles.

 

La laine de mouton est pourtant une production importante de la filière ovine, en Tunisie. Une production qui commence à décliner face à la concurrence des fibres synthétiques et des matelas et autres rembourrages en plastique. Il y a quelques dizaines d’années, la laine de mouton constituait encore une valeur sure et stable autant que l’or pouvait l’être. Elle figurait dans les trousseaux des filles à marier et se transmettait en héritage. La filière lainière employait des milliers de personnes, dont les activités s’étendaient à la tonte, le lavage de la laine, son cardage, son filage et son tissage en Tapis, couvertures, voiles de femmes (sefsari), burnous et Kachabia et bien d’autres usages domestiques.  Le commerce de la laine était prospère et les laines de qualité se négociaient à bon prix.

 

De nos jours, les tondeurs se font rares et leurs salaires sont à la hausse ; la laine collectée trouve de plus en plus difficilement preneur à des prix qui ne couvrent pas les frais de la tonte. Les rares collecteurs qui acceptaient la laine fraichement tondue, exigent maintenant qu’elle soit lavée et parfois même cardée. Les moutonniers sont obligés de garder la laine pendant plusieurs saisons sans trouver preneur, et à des prix ridiculement bas.

La crise du sous-secteur lainier avance à grands pas. Les pays européens du sud notamment ressentent cette crise car la laine qui constituait un bon apport est devenu un sous-produit invendable dont il devient difficile de se débarrasser. En Tunisie, nous suivons la même voie avec quelque retard mais l’issue st irréversible et il convient dès aujourd’hui de prendre les dispositions légales et fiscales pour protéger cette production nationale de la concurrence des fibres synthétiques et du plastique plus généralement.

Production et Transformation de la Laine.

Désormais, la laine de moutons n'est plus valorisée. C’est lié au fait que l'industrie lainière bat de l’aile, que les coûts du lavage et de la préparation du produit sont aussi importants. La laine brute nécessite des traitements pour la débarrasser des crottes, de la paille, du sable et autres impuretés. Autre élément qui explique cette dévalorisation est le manque de compétitivité : la fibre synthétique d'une part et la concurrence étrangère d'autre part. C'est trop cher par rapport à la concurrence qui arrive avec de la meilleure laine. La laine néozélandaise est de meilleure qualité et moins chère.

 

La laine bientôt transformée en isolant ?

 

Mais alors comment relancer une filière ? Plusieurs projets sont en cours et travaillent à l'élaboration d'isolants à base de laine de mouton. La laine est devenue un déchet et les éleveurs n'ont plus de débouchés. Forts de ce constat, on s’est interrogé pour savoir comment ce déchet pourrait être réemployé. On a eu l'idée d'un matériau isolant ; deux produits ont été fabriqués : un feutre isolant pouvant être utilisé à l'extérieur au pied des plantations et des panneaux pouvant être mis entre les murs en double cloisons. Le feutre est composé à 100 % de laine de moutons et les panneaux sont, eux, un assemblage de laine et de coton

Ce feutre isolant, fabriqué à 100 % avec de la laine de mouton, peut être utilisé au pied des plantations. On a un produit local qui évite les importations, on limite l’empreinte carbone. Ce produit apporte aussi une rémunération potentielle pour les éleveurs. Le prix est actuellement à l'étude. Cela concourt donc au maintien des parcours et de l’élevage. En outre, cela fait travailler la filière textile et le bâtiment.

La recherche agronomique et vétérinaire doit s’intéresser à ce problème qui commence à prendre des dimensions économiques négatives et qui touche le troupeau ovin national qui souffre d’autres effets négatifs tels le manque de bergers expérimentés, les parcours dégradés et l’exode rural. 

Pour le Comité exécutif de MVI

Dr. K. El Hicheri


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