Produits et Productions des dromadaires
Medical
Veterinary International organise, avec le concours de l’Office de l’Elevage et
des Pâturages, l’Union Générale des Médecins Vétérinaires de Tunisie, le
Commissariat Régional de Développement Agricole de Tozeur et la Société
Mutuelle de Service Agricole « El Mazraa », le samedi 18 janvier
2020, à l’hôtel El Mouradi de Tozeur, une journée scientifique sur « la
santé et les productions du dromadaire ».
L’opportunité
nous est ainsi, offerte d’informer le lecteur de l’importance de cet élevage
dont les effectifs se sont malheureusement considérablement réduits dans notre
pays, suite à des exportations légales et illégales, vers la Libye notamment,
et au manque d’intérêt des décideurs pour cet animal qui participe à la mise en
valeur des zones désertiques et arides de notre pays. Des décideurs qui ignorent
souvent que le dromadaire est élevé aujourd'hui, non seulement pour effectuer
des travaux agricoles mais également pour sa viande ou pour son lait, sa laine
et son cuir. Le récent développement d’une véritable industrie laitière
caméline dans les pays du Golfe, atteste de l’intensification de cette
production et de la qualité et de l’originalité de ses produits.
Depuis sa
domestication, le dromadaire rend de multiples services à l'homme qui l'utilise
pour sa force de travail (trait, bât, labours) et pour ses productions et
produits (lait, viande, laine et cuir) .
Ce potentiel zootechnique fait actuellement l’objet d’études et de recherches
scientifiques et mobilise l’intérêt des autorités de plusieurs pays où cette
espèce fait l’objet d’une attention particulière. Des travaux sur le lait et la
transformation laitière ainsi que sur la viande sont déjà largement connus de
la communauté scientifique et de ceux qui, dans le public, s’intéressent aux dromadaires
et à leurs productions. L’approche scientifique des deux produits alimentaires (lait
et viande) appréciés des populations des zones d’élevage, porte aussi bien sur
la production que sur les procédés de collecte et de transformation ainsi que
sur leurs qualités nutritionnelles et thérapeutiques, en ce qui concerne le
lait plus particulièrement.
D’autres
produits tels que la laine et le cuir ont également constitué un marché
international après avoir été, pendant des siècles, des produits destinés à
l’artisanat pour la couverture des besoins des peuples du désert et pour les
échanges limités, des marchés traditionnels qui se tiennent dans les oasis qui bordent
ces déserts.
Les camélidés dans le monde : Les dromadaires ont existé, à l’état sauvage, depuis la nuit des temps ; ils auraient été domestiqués en Asie depuis des millénaires et ont été introduits dans l’ancienne Egypte, dans la préhistoire, par des envahisseurs asiatiques. Au Sahara, les peintures rupestres attestent de la présence de dromadaires durant cette période de la préhistoire et, dans l’antiquité, le dromadaire aurait dû son expansion aux Romains qui l’on introduit dans toutes les provinces méridionales de leur empire. Ainsi, le dromadaire aurait été introduit en Afrique de l’Est depuis plus de 2.000 ans et de là, il serait passé en Afrique du Nord.
Géographiquement, l’habitat du dromadaire
se situe en Afrique au Moyen-Orient et en Asie. En Afrique, on le retrouve dans
les pays du Maghreb, le désert du Sahara, les pays du Sahel, le Soudan et les
pays de la corne de l’Afrique, dans les régions désertiques de l’Ogaden. C’est
toutefois un animal qui naturellement n’est pas, capable de passer la barrière
équatoriale.
En
dehors de l’Afrique, on le trouve dans les pays du Proche et du Moyen-Orient
ainsi que dans le sous-continent indien notamment en inde, au Pakistan et en Afghanistan.
C’est à partir de ces pays que les dromadaires ont été importés en Australie au
milieu du XIXe siècle et jusque dans les années 30, date à laquelle la
motorisation a conduit à l’abattage de centaines d’animaux ou à leur abandon
dans le désert central d’Australie où ils ont connu un développement rapide (la
population de dromadaire y dépasserait actuellement 1 million). Une polémique
s’est développée pour valoriser cette ressource animale plutôt que de la
détruire ; polémique qui a abouti à l’exportation des dromadaires sauvages d'Australie vers les pays
du Golfe.
En
Tunisie, la population de dromadaire s’est considérablement réduite du fait de
la motorisation et des exportations vers les pays voisins, notamment la Libye.
La
viande : une
tradition d’embouche dans les pays de la Corne
de l'Afrique, a permis
le développement du commerce international du dromadaire depuis la somalie, le Soudan, l’Éthiopie et Djibouti vers les pays de la péninsule Arabique. La
viande de dromadaire fait, en effet, l’objet d’un marché régional dynamique,
représentant une opportunité pour les pays africains. Son commerce se fait
essentiellement sous forme d’animaux vivants destinés à l’abattage plutôt que
sous forme de carcasses bien que l’Australie tente de promouvoir un marché de
carcasses « hallal » pour ces pays.
En Afrique, les
dromadaires des pays du Sahel africains et de la corne de l’Afrique sont dirigés
vers les pays d’Afrique du Nord et de la Péninsule arabique. Le commerce le
plus important qui a démarré au milieu du XIXe siècle, relie la Corne de
l’Afrique aux marchés égyptien et saoudien. C’est ainsi que plusieurs ports de
la Mer Rouge ou de l’Océan Indien sont devenus des plaques tournantes de ce
commerce. Cependant, une part seulement du marché est formelle et passe par les
circuits officiels. Toutefois, les exigences sanitaires accrues des pays
importateurs du Golfe, ont incités les ports d’exportation à installer des
quarantaines et à établir une certification sanitaire, reconnue
internationalement, par des « Sociétés d’Accréditation Officielle ». De fait,
les circuits « formels » et « informels » se combinent pour un passages «
clandestins » des frontières.
La nature des animaux
vendus change d’un marché à l’autre. Le marché de la Péninsule arabique demande
des animaux jeunes, engraissés dans des fermes spécialisées dès leur arrivée
dans le pays, avant d’être abattus. Les marchés Egyptien et Libyen sont en
revanche demandeurs d’animaux adultes. En Mauritanie, où la viande de dromadaire
représente 25% de la viande rouge consommée localement, depuis la fermeture
pour raisons sanitaires de la frontière marocaine, l’exportation se fait vers
l’Algérie via le Mali et vers le Sénégal par des circuits informels.
Le lait est une composante traditionnelle du régime alimentaire des
tribus nomades des régions désertiques d’Afrique et
d’Asie, depuis des millénaires. Sa composition en nutriments essentiels fait du
lait de chamelle une boisson fortifiante chez les personnes convalescentes chez
lesquelles il renforce les défenses immunitaires. Ces dernières années, ce lait fait
l’objet d’un fort engouement pour ses qualités nutritionnelles et médicinales.
Source
de protéines et autres nutriments, le lait de chamelle est aussi une excellente
source de probiotiques. Il est très nutritif et contient suffisamment de nutriments
essentiels pour être
donné aux bébés souffrant de malnutrition et pourvoir aux besoins alimentaires
quotidien d'une personne. Il est 10 fois plus riche en fer et 3 fois plus riche
en vitamine C que le lait de vache et contient en abondance les protéines nécessaires
au développement des muscles, de l’ossature et des organes. Ses fortes teneurs en sels minéraux,
oligoéléments et vitamine B, favoriseraient le développement des os et
agiraient sur la teneur en immunoglobuline. Il contient plus de protéines et moins
de matières grasses que le lait de vache et sa forte concentration en acides
gras polyinsaturés est
essentielle à l'équilibre nutritionnel. Il est exceptionnellement riche en niacine, en acides aminés
essentiels (valine, leucine et phénylalanine), en acides gras insaturés, en
facteurs antimicrobiens (lysozyme, lactopéroxydase et lactoferrine), en
prostaglandines et en insuline.
Le
lait de chamelle est connu pour ses propriétés anti-infectieuses, anti-cancéreuses, anti-diabétiques et plus
généralement comme reconstituant chez les malades convalescents et dans les
états de fatigue. Il a la réputation de renforcer les défenses immunitaires et
de stimuler l’activité physique des organismes en état de surmenage
Particulièrement
riche en enzymes et en protéines antibactériennes, il renforcerait le système
immunitaire. Sa faible teneur en lactose et la présence d’une protéine proche
de l’insuline faciliterait la gestion du diabète. Les tests effectués sur le
lait de chamelle ont révélé une forte concentration en insuline (5000 fois la
valeur observée chez la vache et 1000 fois la valeur observée chez la femme)
rendant possible une thérapie adjuvante contre le diabète. Ce lait est une
source naturelle d'une protéine semblable à l'insuline ; il aide à réguler
les niveaux de glucose et pourrait aider à une meilleure gestion du diabète.
Ce lait riche en immunoglobulines, peut aider à
cibler et à neutraliser les antigènes étrangers.
En
Tunisie, à Hazoua, dans le Djérid, la SMSA « El Mazraa » a implanté en
2017, un centre de collecte, de conditionnement et de commercialisation du lait
de chamelle qui obtient de bons résultats et qui a encouragé plusieurs éleveurs
à s'organiser pour mieux gérer leurs troupeaux et améliorer la production
laitière de leurs chamelle, encouragés par la création du centre de collecte.
D’ailleurs la SMSA envisage la mise en place d’un autre centre de collecte pour
desservir des zones plus éloignées. Cette société mutuelle devant le succès de
son initiative est en voie de développer la pasteurisation du lait de chamelle en vue de commercialiser un
produit dont la salubrité est garantie. Outre
la pasteurisation du lait, la SMSA procède
à des essais de production de fromage de chamelle et autres produits dérivés, par
la transformation des excédents de lait frais durant les périodes de haute
lactation.
Parmi
les projets de la SMSA, figurent également l’installation d’un abattoir moderne
spécialisé et d’un atelier de découpe pour débiter la viande et la transformer en
sous-produits à haute valeur ajoutée comme la viande découpée et conditionnée
ou la charcuterie.
La laine : Les camélidés ont un
pelage abondant à pousse saisonnière et à qualité variable selon les races et
les espèces. Chez les dromadaires, la laine est de bonne qualité. Sa
récupération se fait par tonte ou par arrachage manuel des fibres qui se
détachent lors des changements de saison. Sa production lainière est
généralement faible et la tonte peu pratiquée. En Inde, la tonte est manuelle
et le plus souvent, la toison est récupérée par arrachage.
Les races africaines
produisent environ 1kg de toison. En Afrique du Nord, il existe des races plus
" lainières " qui permettent de récolter jusqu'à 3 kg de toison. Le
poil du jeune dromadaire est recherché pour sa qualité supérieure à celle de
l'adulte et, Vers l'âge de 2 ans, un chamelon peut produire 3 kg de toison. La
laine de dromadaire ressemble au cachemire. C'est une fibre relativement fine et
moins bien filable que la laine de mouton car beaucoup plus lisse. Il existe
une forte variabilité individuelle liée, à la qualité de l'alimentation et à
l'état sanitaire de l'animal, le parasitisme cutané jouant un rôle important
dans la perte de qualité.
Le travail
de la toison nécessite un nettoyage et un dégraissage préalables. En effet,
après tonte ou récupération manuelle, la laine de dromadaire contient 75 à 85%
de fibres seulement, le reste étant constitué de graisse (4 à 5%) et surtout de
sables et de poussières (15 à 25%). Les fibres filées sont destinées à la
fabrication de vêtements, de couvertures, de tentes ou de tapis.
En
Tunisie, « l’Oubar » cette laine ou poil de chameau sert encore au
tissage de tapis Mergoum ou de Makhla sorte de besace, très appréciées par les
touristes en mal d’exotisme et que les bédouins portent en bandoulière et
utilisent pour transporter leurs aliments (dattes et galettes) lors de leurs
déplacements dans ces régions désertiques.
Le cuir de dromadaire, très souple est utilisé pour confectionner des « affess » ou mocassins, des « balgha » ou babouches, et des sandales ainsi que des produits d’artisanat pour le marché touristique, tels que des sacs de voyage, des portes-feuilles, des sacs à main et autres.
Du papier avec de la crotte de dromadaire. En Inde où la population de dromadaire est très importante, les crottes de dromadaires, très cellulosiques servent à fabriquer du papier après un traitement adéquat. La technique constitue une première, au Rajahstan, en Inde, où l’élevage des dromadaires est important et où la matière première ne manque pas. Il s’agit là d’une production
« écologique » qui souligne la valorisation multi-usage permise par l’élevage camélin dans le pays.
Dr. Khaled El Hicheri
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