Le médicament vétérinaire face aux
monopoles
Le monopole d'importation et de
commercialisation accordé à la Pharmacie Centrale de Tunisie (PCT) est contesté
par les vétérinaires qui considèrent que pour cet organisme, le médicament
vétérinaire est un produit de second plan dont la gestion des stocks est
négligée, ce qui entraîne souvent des ruptures d’approvisionnement. Ils
considèrent que ce monopole n’a que trop duré et ne se justifie plus par des
motifs d'ordre économique de centralisation, avancés dans les années 60 mais
qui n’ont plus leur raison d’être de nos jours, où ils ne correspondent pas à
la politique générale de libéralisation des échanges et de large concurrence.
Ils considèrent qu’au niveau de la production,
la PCT n’a pas pu jouer un rôle de leader, laissant se créer un vide dans
lequel se sont heureusement engouffrées des unités industrielles privées
contrôlées par les services officiels mais malheureusement aussi des
importateurs illégaux échappant à tout contrôle. A côté des importations
officielles de médicaments, effectuées par la PCT, des circuits parallèles
illégaux prenant leur source dans les pays limitrophes, se sont mis en place et
concerneraient notamment le secteur avicole. Ces importations illégales
représenteraient une part importante (60 % environ) des médicaments
aviaires utilisés en Tunisie dont une partie serait représentée par
l'importation légale de matières premières destinées à la préparation d'aliments
médicamenteux et d'additifs (antibiotiques, anticoccidiens, vitamines et
oligo-éléments) et dont certaines quantités seraient détournées de leur
destination initiale et conditionnées pour être vendue directement aux
aviculteurs, sous forme de médicaments.
Cette situation porte un tort considérable à
l’élevage et à ceux qui ont la charge de le développer et de le protéger et en
finalité aux consommateurs. C’est pour ces raisons que les vétérinaires ont
fait de la moralisation des circuits de distribution et de l'usage de ces
médicaments une de leurs revendications principales. Ils estiment qu’il est
grand temps de mettre de l’ordre dans les pratiques illégales dans la
distribution au détail du médicament vétérinaire et de sa vente illicite à ciel
ouvert, au su et au vu de tous.
La situation dans le pays a beaucoup évolué
depuis l’ère du socialisme. Plusieurs unités de fabrication de médicaments
vétérinaires ont vu le jour et couvrent déjà une partie des besoins du pays,
notamment dans le secteur de l’aviculture industrielle et de la production
laitière intensive ; un laboratoire national de contrôle des médicaments
installé par le ministère de la Santé Publique, garantit la qualité des
médicaments à usage vétérinaire ainsi produits.
La croissance de la production nationale de
médicaments vétérinaires aura pour premier résultat la réduction du volume des
importations et donc de l’activité de la PCT dans ce domaine et le nombre, déjà
important, d’unité de production introduira une saine concurrence dont les
effets sur la baisse des prix ne manqueront pas d’influer sur les coûts des
productions animales, au profit des éleveurs et des consommateurs.
La réduction des coûts des médicaments
vétérinaires passe également par la suppression des diverses taxes qui grèvent
ces produits, la réduction des marges bénéficiaires de la PCT, des grossistes
répartiteurs et des officines pharmaceutiques et la révision des circuits
d’importation, de production et de commercialisation, en supprimant les
monopoles de la PCT et de la corporation des pharmaciens et en accordant aux
vétérinaires, pionniers de l’industrie pharmaceutiques nationale, la
possibilité de s'adonner librement à la production, à l'importation et à la
distribution des produits vétérinaires comme cela est le cas dans les autres
pays de l’UMA et de la plupart des pays du globe.
La
protection de la santé publique doit obligatoirement transiter par la
suppression des monopoles et des chasses gardées et par l’organisation et la
moralisation des circuits de distribution des médicaments vétérinaires car ces
importations illégales et ces détournements échappent à tout contrôle de
qualité et constituent un danger permanent pour le cheptel et pour la santé de
la population.
Dr. Khaled EL HICHERI
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