Accéder au contenu principal

Une page d’histoire : La médecine vétérinaire en Occident *

 

Une page d’histoire : La médecine vétérinaire en Occident *

Je souhaiterais, pour entamer cet article, faire référence au Professeur Leclainche (« Histoire de la médecine vétérinaire» Pr. Leclainche – 1936), premier Directeur Général de l’Office International des Épizooties (OIE) qui disait en 1936 : « La curieuse histoire de la médecine des animaux serait déconcertante pour un lecteur non averti. Née avec les civilisations primitives et longtemps confondue avec la médecine de l’homme, elle s’en sépare brusquement au temps de Socrate et de Platon. Encore honorée pendant quelques siècles à Rome et à Byzance, elle s’étiole et s’efface pour végéter misérablement, oubliée ou méprisée, pendant quatorze cents ans (……) Annihilée dans le monde chrétien par l’interdit jeté sur elle, la médecine des animaux renait aussitôt dès qu’elle échappe à la réprobation qui l’accable. Chez les Arabes, elle retrouve sa place à côté de la médecine de l’homme sous l’égide d’une religion qui ne lui oppose aucun obstacle.»

En Occident, après un passage assez obscur au Moyen Age et pendant la Renaissance, périodes au cours desquelles la médecine vétérinaire n’était qu’un art abandonné à l’empirisme, c'est durant la seconde moitié du 18ème siècle qu'une médecine vétérinaire scientifique commença véritablement à prendre forme et qu’un enseignement structuré canalisa le savoir scientifique et technique, lié à l’art vétérinaire. Lors de la création des premières écoles vétérinaires, comme chez les Arabes, le cheval était roi, il apportait l’énergie nécessaire à de multiples activités et sans lui, l’économie aurait stagné ; aussi, la maréchalerie et l’anatomie du cheval constituaient-elles la base d’un enseignement vétérinaire quelque peu rudimentaire, focalisé sur une seule espèce animale.

 

L'entité médicale spécifiquement vétérinaire ne se précisera qu'un siècle plus tard. Entretemps, cet enseignement s’était enrichi successivement de plusieurs disciplines comme l'anatomie-pathologie, la bactériologie, la parasitologie, la zoologie, la botanique, la chirurgie, l'obstétrique et la physiopathologie qui, au départ, étaient enseignées, il faut le souligner, par les médecins, dans de nombreux pays, faute de vétérinaires enseignants. A partir de là, l’enseignement et la pratique vétérinaires évoluèrent très vite ; la pathologie domina l’enseignement vétérinaire, suivie de près par la parasitologie, par la chirurgie et par l’obstétrique. A la fin du 19éme siècle, les nombreuses découvertes dans les domaines de la bactériologie et de l’immunologie accélèrent le mouvement de modernisation de l’enseignement vétérinaire qui acquit alors son caractère scientifique.

 

Sur le plan de la formation, le déclin de l’utilisation du cheval entraina une transformation rapide de l’enseignement et de la pratique vétérinaires. D’autres espèces animales, de rente ou de compagnie, reflets des changements économiques et sociaux opérés, remplacèrent progressivement le cheval dans l’enseignement vétérinaire, dominé de plus en plus par la pathologie.

 

La seconde moitié du 20ème siècle est également témoin de la féminisation de la profession. L’accès de l’élément féminin aux études vétérinaires, timide au début, prend de l’importance à partir des années 1970 pour finir par constituer la majorité des étudiants des écoles vétérinaires, partout dans le monde, y compris dans bon nombre de pays dits en voie de développement. D’un autre côté, l’enseignement vétérinaire se diversifie pour faire face aux nombreuses activités exigées par l’économie moderne et le progrès social.

 

La promotion du médecin vétérinaire dans le monde scientifique, dans l’administration et dans l’échelle sociale a entraîné, par voie de conséquence, une amélioration de la qualité et de la densité de l’enseignement vétérinaire qui finit par figurer parmi les meilleurs enseignements prodigués dans les universités, permettant l’accès à une profession passionnante à plus d’un titre. L’entrée dans les écoles et facultés vétérinaires est devenue alors plus difficile, exigeant des études préparatoires et des concours d’entrée parmi les plus ardus. Dès 1881, le baccalauréat était exigé aux examens d’admission dans les écoles vétérinaires françaises mais ce n’est que 42 ans plus tard, en 1923, que ces mêmes écoles ont obtenu le statut d’établissements d’enseignement supérieur et que fut créé le Doctorat en médecine vétérinaire.

 

Dr. Khaled El Hicheri

 

*Extrait du livre “La médecine vétérinaire en Tunisie : passé, présent et avenir » du Dr. K. El Hicheri.

 

 

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Histoire du caducée vétérinaire

L’histoire du caducée, emblème des corps de santé, remonte loin dans le temps. Il n’est pas une profession de santé, qui n’arbore un caducée spécifique où se retrouvent : le bâton, le serpent et les ailes. Le caducée vétérinaire n’échappe pas à la règle. Des caducées spécifiques à chaque profession ont, au cours des temps, été arborés sur les enseignes, les panneaux indicateurs, les véhicules des professionnels de santé, les ordonnances, les papiers à en-tête, les enveloppes, les porte-clés et bien d’autres objets liés aux activités professionnelles. Il convient, toutefois de signaler que le caducée est souvent confondu, à tort, avec l ' emblème  du  corps médical , le  bâton d'Asclépios ou bâton d'Esculape , avec la  coupe d'Hygie  des  pharmaciens   ou d'autres symboles médicaux ou paramédicaux dérivés de ces derniers. L’origine du caducée se trouverait dans la mythologie grecque ou romaine, faite de légendes et de fables qui expli...

L’élevage ovin en Tunisie : une richesse à préserver

L’élevage ovin en Tunisie : une richesse à préserver L’élevage des ovins est une pratique traditionnelle qui remonte aux temps immémoriaux. Cet élevage demeure de nos jours, la principale source de revenu de la population rurale du Centre et du Sud du pays. Il joue un rôle socio-économique important, et confère plus d’importance au secteur de l’élevage dans l’économie agricole (35 à 40% du PIB agricole) et dans l’économie nationale (et 4 à 5% du PIB national). Il contribue en outre à l’emploi, de manière significative : le nombre d’éleveurs de petits ruminants (ovins et caprins) est estimé à 300.000. Les effectifs de l’élevage ovin en Tunisie se situent à près de quatre millions d’unités femelles ; cet élevage participe pour près de 50 % à la production des viandes rouges. Avant les années 60, les effectifs dépendaient des conditions climatiques et les pertes durant les années de sécheresse, pouvaient atteindre près de 30 % des effectifs. Grâce aux campagnes de s...

L’élevage caprin en Tunisie

L’élevage caprin en Tunisie L’espèce caprine est présente partout dans le pays. Son élevage est pratiqué depuis des siècles, suivant des systèmes liés aux conditions du milieu. La chèvre a toujours joué un rôle essentiel dans les régions marginales tunisiennes ; son élevage est de type extensif et son alimentation est basée sur l'utilisation quasi exclusive des ressources fourragères des parcours. Sa productivité est faible et ses productions contribuent essentiellement à la consommation familiale et comme source de trésorerie mobilisable. Les races locales prédominantes sont de type mixte, d'aptitude laitière généralement médiocres. Son lait est utilisé pour la consommation familiale et les chevreaux qui ne sont pas sacrifiés lors des fêtes et des évènements familiaux, sont vendus sur les marchés hebdomadaires à un âge assez tardif. Les performances zootechniques des caprins tunisiens sont faibles, ils sont par contre parfaitement aptes à valoriser les fourrages ligneux d...